Qui aime Donald Trump ?

18 décembre 2015


 
De propriété privée et située au New Jersey, l’université Monmouth est une maison d’enseignement universitaire fréquentée par plus de six mille étudiants.

Parmi les organismes qui logent sur son campus se trouve le Monmouth University Polling Institute (MUPI), ce qui signifie l’Institut de sondage de l’université Monmouth.

Ses sondages sont renommés pour leur précision et leur exactitude.

Entre le 10 et le 13 décembre dernier, cet organisme a effectué un sondage téléphonique auprès de 1 006 adultes américains, dont 385 sympathisants républicains. Ce sondage portait sur la popularité des candidats à la chefferie du Parti républicain.

En comparant ses résultats à ceux des sondages antérieurs effectués par le MUPI, on apprend que le meneur de la course républicaine, Donald Trump, a accru de treize points son avance sur ses rivaux à la suite du scandale provoqué par sa suggestion d’interdire temporairement l’immigration de Musulmans aux États-Unis.

En d’autres mots, en dépit de la condamnation universelle de ses propos, Donald Trump est encore plus populaire qu’il l’était auprès de l’électoral républicain, passant d’une intention de vote de 28% (à la mi-octobre 2015) à 41% (la semaine dernière).


 
Au-delà du millionnaire extravagant et de l’homme politique qui agit comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, Donald Trump est un phénomène social.

Pour essayer de le comprendre, voyons quelles sont les caractéristiques de ses partisans.

Les intentions de vote en sa faveur (41%) se retrouvent un peu plus chez les hommes (44%) que chez les femmes (37%).

Il existe une relation directe entre la sympathie pour le mouvement radical américain appelé Tea Party et l’appui à Donald Trump, passant de 36% chez les Républicains qui n’aiment pas le Tea Party, à 52% chez ceux qui en sont de fervents partisans.

Les résultats les plus étonnants du sondage du MUPI concernent la relation entre le niveau de scolarité et l’appui à Donald Trump.

Chez ceux qui ont fait des études collégiales — l’équivalent des CÉGEPs au Québec ou des lycées en France — sans toutefois s’être rendus à l’université, entre 31% et 34% appuient Donald Trump. Mais cette popularité grimpe à 54% chez les détenteurs de diplômes universitaires.

Pour tenter d’expliquer cette popularité, j’émettrais l’hypothèse suivante.

Le système éducatif américain se distingue de tous les autres à travers le monde par son ‘USA-centrisme’.

Il forme des citoyens parfaitement aptes au travail, capables d’un esprit critique et de beaucoup de créativité.

Mais les Américains ne connaissent à peu près rien du monde à l’extérieur de leurs frontières. Ils ne s’intéressent à un autre pays que lorsque leurs armées décident d’y faire la guerre.

Et le peu qu’ils connaissent de l’histoire récente du monde ne leur permet pas de tirer des leçons de leurs erreurs tant la machine de propagande républicaine est efficace à déformer les faits et à brouiller les esprits.

En somme, même les Américains les plus intelligents sont en fait des abrutis lorsqu’il s’agit de politique étrangère.

Selon un autre sondage, réalisé par Public Policy Pooling, 41% des partisans de Donald Trump sont favorables à ce qu’on bombarde l’Agrabah. Seulement 13% s’y opposent.

Les 46% d’indécis ont bien raison car le royaume arabe d’Agrabah n’existe pas. Il a été créé par les studios Disney pour étoffer le scénario du film d’animation Aladin, ce personnage fictif des Mille et une nuits.

Aux États-Unis, d’innombrables groupes de réflexion conservateurs, très bien financés, attirent les intellectuels dans le but de créer une idéologie simple qui contribue à cet abrutissement collectif, illustré par les résultats de ce deuxième sondage.

Depuis des années, cette idéologie simpliste se répand grâce à Fox News, à la démagogie primitive des radio-poubelles, aux forums de discussion noyautés par ses adeptes, et aux films hollywoodiens où la rigueur historique cède la place à la romance et aux sentiments patriotiques.

Voilà pourquoi aujourd’hui les Républicains sont heureux d’entendre enfin un homme politique qui leur dit ce qu’ils veulent entendre et qui partage avec eux leur vision simpliste du monde. Faut-il s’en étonner ?

Références :
Monmouth University Polling Institute
Trump Lead Grows Nationally; 41% of His Voters Want to Bomb Country From Aladdin; Clinton Maintains Big Lead
Les Mille et Une Nuits

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Écrit par Jean-Pierre Martel