La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (3e partie)

Le 17 janvier 2015

De la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à l’effondrement du mur de Berlin, le monde se divisait en deux clans hostiles; les Communistes et le monde libre.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, nous sommes entrés dans un autre monde bipolaire; les terroristes et nous.

Tous les services de renseignement s’emploient à les différencier. Mais se peut-il qu’on ne naisse pas terroriste ? Et si on le devient, comment empêcher cette radicalisation ?

La plus grande menace terroriste qui plane actuellement sur les pays occidentaux est celle des milieux intégristes musulmans, mieux organisée et mieux financée que toute autre.

Si l’exclusion sociale prédispose à la criminalité, elle ne semble pas avoir grand importance dans la genèse du terrorisme, en dépit de ce que terrorisme en Europe semble suggérer.

Comme nous l’avons vu dans le second volet de cette trilogie, cette genèse nécessite seulement la rencontre de deux pré requis : un élément déclencheur et l’exposition à des idées radicales.

Si on devait enquêter auprès de chaque terroriste afin de savoir quel a été, dans son cas, cet élément déclencheur qui l’a bouleversé et rendu réceptif à une idéologie extrémiste violente, on obtiendrait sans doute autant de réponses qu’il aura de répondants.

Dans tous les cas où ce déclencheur est connu, il fait partie du contentieux déjà connu entre Musulmans et pays occidentaux. Ce contentieux s’articule autour de deux pôles : le conflit israélo-palestinien et la multiplication des guerres suscitées par les pays occidentaux dans des pays musulmans.

La guerre coloniale qu’Israël livre en Palestine

Tous les prétextes sont bons pour déposséder les Palestiniens de leurs terres, pour détruire leurs sources de revenus, pour massacrer ceux d’entre eux qui se révoltent, et pour implanter des colonies juives.

Fondamentalement, les dirigeants israéliens font aujourd’hui ce que les autorités britanniques ont fait pour affamer, puis décimer les peuples autochtones de l’Amérique du Nord afin de peupler leur territoire de braves pionniers européens.

Les 16 et 17 septembre 1982, alors que les camps palestiniens de Sabra et Chatila au Liban sont encerclés par l’armée israélienne et que la population y avait été désarmée, l’armée israélienne laisse entrer les milices chrétiennes qui y tueront hommes, femmes et enfants pendant deux jours. Le massacre fit entre 800 et 3 500 victimes. Ce carnage suscita une indignation généralisée, même en Israël.

À travers le monde, la population palestinienne est estimée à environ 11 millions de personnes, dont 3,7 millions en Palestine. On comprend donc l’importance de ce massacre pour ce peuple.

Au cours de la Seconde intifada, les soldats israéliens tiraient des balles réelles sur des adolescents arabes qui leur lançaient des pierres. De plus, l’armée israélienne postait des tanks devant les hôpitaux bombardés, tanks qui avaient pour mission de tirer sur les ambulances qui y apportaient des blessés.

Depuis quelques années, le gouvernement canadien est devenu l’allié inconditionnel d’Israël, contrairement au gouvernement américain qui exprime régulièrement des réserves précisément au sujet de cette politique coloniale.

Le Canada endosse totalement les politiques israéliennes en territoires occupés. Notre pays considère que les Palestiniens doivent éviter toute violence et accepter passivement la dépossession dont ils sont l’objet, comme les autochtones canadiens, idéalement, auraient dû le faire quand le colonisateur britannique les a confinés à des réserves indiennes.

Évidemment le zèle canadien expose notre pays (ses représentants et la population qui les porte au pouvoir), au ressentiment de ceux qui sont opposés violemment à cette politique coloniale.

La politique extérieure du gouvernement Harper augmente donc les risques que des attentats terroristes soient commis au pays.

La prévention du terrorisme au pays passe donc vers une révision de notre politique extérieure afin de la purger de ses éléments extrémistes et inutilement provocants.

Ceci étant dit, on aurait bien tort de croire qu’il suffirait d’adopter une politique extérieure rose-bonbon pour nous soustraire à la menace terroriste. Afin d’attirer du financement, les groupes terroristes ont besoin de réussir leurs attentats quelque part, n’importe où.

Les guerres suscitées en pays musulmans

La guerre du Golfe (1990-1991)

D’aout 1990 à février 1991, les États-Unis ont mené une coalition de 34 pays afin de délivrer un pays arabe, le Koweït, envahi par un pays voisin, l’Irak. Cette guerre justifiée par le Droit international a fait 1 100 morts et à peu près autant de blessés.

La guerre d’Afghanistan (2001-2014)

Les attentats du 11 septembre 2001 à New York étaient implicitement une déclaration de guerre contre les États-Unis. Leur réaction — la guerre d’Afghanistan — se justifiait donc par la légitime défense.

Dans un premier temps, les États-Unis se sont contentés de fournir une aide logistique aux rebelles Afghans (l’Armée du Nord) afin qu’ils chassent les Talibans du pouvoir.

Puis, à la demande des nouveaux dirigeants du pays, les pays occidentaux ont occupé l’Afghanistan.

Selon Wikipedia, cette guerre et cette occupation étrangère se sont soldées par la mort de plus de 20 000 personnes parmi la population civile.

La guerre d’Irak (depuis 2003)

La Guerre d’Irak et l’occupation militaire qui a suivi avaient pour but de libérer le pétrole irakien de l’embargo international dont il était l’objet et lui permettre d’être écoulé librement sur les marchés mondiaux afin d’en abaisser le prix.

Le décompte des pertes civiles en Irak varie selon les études. Il serait compris entre 100 000 et 1 450 000 morts.

La guerre civile libyenne (depuis 2011)

À l’occasion du Printemps arabe, divers soulèvements ont éclaté en Libye. Les pays membres de l’OTAN ont armé les rebelles et ont procédé au bombardement des défenses gouvernementales libyennes.

Après la chute du dictateur libyen, les mercenaires étrangers qui ont participé à ce renversement sont repartis avec leurs armes. Certaines de ces milices se sont mises depuis au service d’Al-Qaida au Sahel.

La guerre civile syrienne (depuis 2011)

Après avoir soutenu et armé les rebelles jugés modérés au régime de Bachar el-Assad, les États-Unis ont assisté, impuissants, à la montée en force des milices radicales de l’État islamique.

Celles-ci ont profité du vide créé par l’effondrement de l’état syrien pour créer une vaste zone de chaos et de violence en Syrie et en Irak.

Selon Wikipédia, le nombre de morts reliés à la guerre civile syrienne serait de l’ordre de 100 000 à 130 000.

La mondialisation du chaos

Le développement des moyens de transport a favorisé les échanges transfrontaliers. De nos jours, les appareils photo et les caméras captent des images prêtes immédiatement à être diffusées à travers le monde. Grâce à l’internet, textes et photos voyagent à la vitesse de la lumière.

Mais la mondialisation du commerce et de la finance s’est accompagnée de la confrontation d’idées et de cultures très différentes, voire opposées, qui s’ignoraient jusqu’ici en raison de l’éloignement.

Dans un premier temps, les gouvernements occidentaux ont puisé dans cette somme colossale d’information pour prouver leur supériorité morale et justifier la mission civilisatrice de leurs interventions militaires à l’étranger.

En semant la guerre et la désolation, les pays occidentaux ont favorisé les contrats d’armements au bénéfice de leur industrie militaire. Dans les pays atteints et les pays voisins, ils ont favorisé la fuite des capitaux et celle des cerveaux à leur avantage.

En contrepartie, ils ont favorisé l’émergence de dizaines de milliers de guerriers dont la seule expertise est dans l’art de piller, de violer et de détruire.

Ces barbares vivent à quelques heures de route d’Europe et à une dizaine d’heures de vol d’Amérique. Leurs idées sont à quelques millisecondes des ordinateurs de nos adolescents.

Selon un adage, celui qui sème le vent récolte la tempête. Il peut donc sembler naïf de penser qu’on peut semer la mort et la désolation sans susciter la haine et le désir de revanche.

C’est pourtant ce phénomène auquel nous assistons. Mais puisque nos gouvernements ne sont pas prêts à modifier leur politique étrangère prédatrice à l’égard des pays musulmans producteurs de pétrole, ils en sont réduits à essayer de contenir le mal qu’ils ont créé.

Dans le dernier texte de cette série, nos passerons en revue les moyens de lutte défensive contre le terrorisme.

Références :
Armée syrienne libre
Deuxième guerre civile libyenne
Guerre civile syrienne
Guerre d’Afghanistan (2001-2014)
Guerre d’Irak
Guerre du Golfe
La guerre en Irak ou l’aveuglement collectif américain
La mission canadienne en Afghanistan ou la perpétuation de coutumes arriérées
Le décès d’Ariel Sharon, criminel de guerre
Loi sur les Indiens
Mouammar Kadhafi
Première guerre civile libyenne
Syrie : la Turquie et les Etats-Unis à la rescousse de Kobané

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3 commentaires à La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (3e partie)

  1. Pierre Pinsonnault dit :

    Merci M. Martel de ce rappel de plusieurs faits probants liés au terrorisme.

    Permettez-moi de vous faire part d’«idées excuses » qui me trottent, de façon pessimiste, dans la tête depuis bien longtemps comme pouvant nuire à la résolution du problème :
    1) il y en a qui se disent « c’est lui qui a commencé »;
    2) d’autres se disent « il est trop tard pour reculer, que nous ayons ou non déjà été trop loin »;
    3) certains nous questionnent dans le genre « qu’aurais-tu fait à ma place ? ».

    Une chose est certaine c’est que le bon peuple que nous sommes ne semblent pas s’apercevoir ou l’oublient rapidement que nous sommes en quelque sorte depuis des siècles les receleurs de biens et travaux forcés volés à d’autres sociétés.

    En tous les cas, j’ai hâte de lire votre prochain article cette fois sur la prévention. Pour le moment, j’ai signé la proposition d’Avaaz : « Les 3 résolutions qui peuvent changer le monde » que vous connaissez peut-être déjà et qu’on trouve à:
    https://secure.avaaz.org/fr/three_principles_loc/?bZaQwbb&v=51210

    Je me suis dit que c’était mieux que rien. (o:

    Au plaisir de vous relire !

  2. sandy39 dit :

    ECHANGES POUR UNE MONDIALISATION…

    Moi aussi, j’y crois ! Idées et Culture se confrontent à grande vitesse…, si ce n’est à la milliseconde !

    Surtout pour nos Ados qui sont en pleine crise d’Identité et, facilement influençables, devant l’abondance d’infos circulants sur leurs écrans… Fragilité de Certains Esprits, en pleine construction, en pleine recherche de leur “MOI”.

    Je me pencherai, plus tard, sur les 3 grands principes… pour Pierre…

  3. sandy39 dit :

    SAGES AMBITIONS…

    A Pierre,

    Quel beau projet plein de Sagesse pour donner un sens philosophique à sa Vie !

    GENTILLESSE ET RESPECT : pour répondre, je vais être obligée de me dévoiler un peu… Je ne suis pas quelqu’un de méchant. Et, je le sais depuis longtemps : la méchanceté ne rapporte rien dans la Vie !

    Pour respecter les Autres, il faut déjà se respecter soi-même. Et, on peut remplacer le verbe RESPECTER par AIMER, ça marche, aussi, dans le même sens !

    SAGESSE : prendre des décisions justes : celles qui sont justes pour Nous (pour Soi) ne le sont pas forcément pour les Autres.

    Ecouter son for intérieur et écouter les Autres : parfois difficile de trancher.

    Equilibre entre notre Raison, notre Cœur et nos Intuitions dans une harmonie qui sonne juste ? Mais, souvent, c’est l’Elan du Cœur qui est la meilleure combinaison de notre Raison qui, en devient notre propre harmonie qui sonne juste ou non.

    Enfin, on essaie que cette harmonie résonne dans notre Cœur et dans notre corps, même si cette harmonie ne raisonne pas tout à fait avec les Autres…, ne résonne pas de la même façon, ni du même son, chez les Autres… Tant que Chacun, à l’Intérieur, garde l’Equilibre…

    L’Equilibre intérieur pour Moi serait de faire des choses justes – enfin, des choses vraies qui ne sont pas forcément justes ! – pour Soi, donc c’est faire justice envers soi-même, donc c’est donner un sens à sa Vie !

    RECONNAISSANCE : envers ceux qui nous font devenir ce que nous sommes… ceux qui nous aident à nous concentrer sur ce qui compte vraiment… n’est-ce-pas, Messieurs ? Surtout, quand Pierre, de si loin, le premier, me souhaite la Bonne Année !

    Pour finir, à l’Horizon d’une Vie, en accord avec soi-même, même si les Autres ne sont pas d’accord, avec nos choix !

    Si Pierre considère que c’est toujours mieux que rien… Moi, je trouve que c’est déjà beaucoup, simplement ENORME !

    Gardons, tout d’abord, la Conscience et, évitons de nous laisser embobiner (je ne sais pas si vous l’employez, depuis votre Québec !) par de belles paroles… émises par je ne sais qui…

    Méfiance de tous ces organismes… car certains profiteraient, encore, de la faiblesse de Certains Esprits…

    Alors, restons forts et, restons dignes !

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